Le ministère de la Santé mène depuis des semaines tambour battant une campagne pour exhorter les Tunisiens à se faire vacciner massivement contre la grippe saisonnière. A l’approche de l’hiver, l’objectif étant d’éviter de voir s’entrechoquer le Covid-19 et la grippe saisonnière, elle-même responsable de plusieurs milliers de décès chaque année. Mais aussi pour éviter tout retard de diagnostic, à cause des effets délétères qui peuvent provoquer des complications, notamment chez les personnes les plus exposées, en l’occurrence le personnel de santé, les plus vulnérables tels que les personnes âgées, ceux qui souffrent de maladies chroniques respiratoires, les femmes enceintes et les enfants en bas âge. Car si on contracte le virus de la grippe et le coronavirus, cela accroît le risque de mortalité chez cette catégorie de personnes.
Cette campagne de sensibilisation a eu donc un effet de choc auprès des Tunisiens qui ont pris d’assaut les pharmacies à la première annonce de la livraison du premier lot de doses de vaccin. En quelques heures seulement, le vaccin a été épuisé chez les apothicaires. Il s’agit de 100.000 doses dont la moitié aurait servi à vacciner le personnel de santé. Pour une population qui compte douze millions de personnes, le ministère de la Santé a décidé d’importer 380 mille doses de vaccin. Une quantité très largement en decà des besoins d’un pays frappé de plein fouet par la pandémie de Covid-19. A titre d’exemple, la Belgique, qui compte à peu près le même nombre de population, a importé trois millions de doses, une quantité jugée insuffisante pour une vaccination massive chez les Belges. D’où le désarroi des Tunisiens et des pharmaciens qui comptent déjà par milliers le nombre de personnes qui auraient réservé des doses auprès d’eux.
Et même si les prochaines livraisons seraient bientôt disponibles, il faudrait se saigner aux quatre veines pour obtenir quelques doses, les quotas servis aux pharmaciens se comptant par dizaines uniquement.
Mais maintenant que la demande a énormément augmenté et que l’on sait que les quantités prévues ne suffiraient pas à vacciner tous ceux qui répondent aux conditions requises, il est peu probable que le ministère de la Santé puisse trouver le feu sacré pour importer un million de doses comme il l’a annoncé hier à l’ARP sans tenir compte de l’indisponibilité immédiate du vaccin sur le marché.
A qui incombe la responsabilité de cette énième défaillance ? Pas aux citoyens en tout cas. C’est encore une bourde de communication et de planification sanitaire qui prouve, si besoin est, l’absence d’une stratégie de lutte contre le coronavirus en Tunisie. Sommes-nous condamnés à encaisser et subir les torts, les dysfonctionnements et le manque de coordination entre les diverses structures sanitaires dans notre pays ?